Le rêve australien
Meilleurs salaires et plus d’opportunités. L’Australie est devenue l’eldorado des jeunes Réunionnais qui ne veulent plus rentrer chez eux. Mais pas facile d’y rester.
La belle vie : du travail à foison, des cases pas chères et une île bien plus vaste que l’Europe. Nous sommes à Perth, où les Réunionnais trouvent leur bonheur depuis plusieurs années. À une dizaine d’heures de vol de Saint-Denis, la ville est située sur la côte ouest de l’Australie. La ville accueillerait entre 50 et 100 jeunes du département chaque année. La raison majeure n’est pas seulement l’université de Murdoch mais aussi le grand nombre de petits boulots dans la restauration qui payent « super bien », comme l’estime Angélique, 25 ans, originaire de Saint-Denis. Des salaires qui autorisent une colocation dans une grande maison entre la plage et la ville. Le but pour un bon nombre de Réunionnais est de s’installer pour de bon. Angélique qui vit depuis 5 ans à Perth, est serveuse depuis quelques années et gagne plus de 20$ de l’heure (environ 16 euros). « On est nombreux à faire ce genre de travail et financièrement on se débrouille toujours bien, affirme-t-elle. Je serai encore plus heureuse dans quelques mois quand je donnerai des cours de yoga ». Même si ces jeunes ne sont pas imposables, ils sont soumis à un prélèvement à la source. Des économies forcées puisque, jackpot surprise à la fin de l’année, 3000$ peuvent leur être remboursés. Selon Maxime, 24 ans, originaire de La Montagne, qui travaille à la fois dans la comptabilité et la restauration, c’est aussi l’accueil et la gentillesse des australiens qui lui ont donné envie de rester. Le processus commence à La Réunion, à l’aide d’organismes tels que RunAustralia. Implantée à Sainte-Clotilde, la société a pour mission de prendre en charge les formalités pour partir en séjour linguistique, poursuivre ses études ou profiter du Visa Tourisme Travail. La société prend entre 100 et 150 euros pour ses services. « Le Working Holiday Visa permet aux jeunes de travailler tout en voyageant pendant un an ou deux, explique Chloé Guay, la directrice assistante de RunAustralia. C’est le visa le plus demandé qui permet aux jeunes de tester le niveau de vie australien. »
Pierre-Louis, 24 ans, dont les parents habitent à Montgaillard, n’a pas pu continuer ses études à Perth car elles étaient trop coûteuses. Maintenant basé à Paris, il refuse de rentrer à La Réunion mais rêve de repartir au pays des kangourous.
Un visa onéreux
Une fois installés à Perth, les jeunes se retrouvent souvent entre eux. De ce fait, il existe aujourd’hui une association australienne dédiée à cette diaspora. Reunionese Association in Australia se joint à de nombreux évènements afin de faire découvrir la culture et la nourriture créole à Perth. « Nous estimons qu’il y a près 1000 Réunionnais à Perth », annonce Carole Rakotonirina, coordinatrice de l’association. Une véritable communauté réunionnaise vit donc le rêve australien. Mais le rêve s’achève souvent prématurément.
Le Working Holiday Visa est valide un an seulement, prolongeable d’une année supplémentaire si l’on travaille pendant trois mois dans une ferme dans la campagne australienne : le fruit-picking. Le travail le plus commun est la cueillette de fruits du lever au coucher du soleil pour lequel étrangers gagnent 10$ par jour. Épuisant lorsqu’il s’agit de pastèques. Ce fut le choix de Nora, 27 ans, originaire de Montgaillard, qui entame sa deuxième année en Australie : « J’ai cueilli des fruits, travaillé au marché, posé du fil de fer et conduit un Bobcat mais ça en vaut la peine! ».
Pour obtenir une résidence permanente, les options sont limitées. Le plus simple est de se faire sponsoriser par son employeur, ce qui n’arrive pas souvent. Cela coûte entre 3 et 8000$ à l’employeur qui doit également prouver que son employé lui est indispensable. Il existe également une liste de métiers (modifiable selon le besoin de l’Etat) pour lesquels le gouvernement australien est prêt à donner la résidence (comptable, ingénieur, chirurgien, infirmière…). Pas évident non plus. Ensuite, il reste l’option du visa « de facto » (2060$) dans le cas où l’on peut prouver une année de vie commune avec un(e) Australien(ne). Après deux ans, il est possible de demander la résidence, ce qu’a pu faire Angélique, qui habite avec son copain originaire de Perth. Maxime, lui, a choisi le métier de comptable inscrit sur la liste de l’Etat. Il sera résident permanant dans quelques mois. Pour ceux qui parviennent à rester dans cet eldorado australien, il n’est malgré tout pas question d’oublier leur petite île d’origine. « J’avoue que La Réunion me manque souvent ; je pense que c’est là-bas que je finirai ma vie », termine Angélique.
Soe HITCHON